, Ces critères doivent permettre de classer les établissements pour leur attribuer des ressources et, de même qu'il s'agissait, dans le rapport du Collège de France, de trier le bon grain de l'ivraie, l'ARESER n'a aucun scrupule à annoncer la couleur : il faut éviter les rentes de situation des établissements les mieux classés et ne pas hésiter à pénaliser les mauvais éléments avec « des systèmes de sanctions plus rapides et plus réels », « des procédures de "clignotants, experts pour qui l'urgence est désormais de développer des « indicateurs produits avec un maximum de garanties de rigueur, par les chercheurs spécialisés dans ces questions », et d'assurer « transparence » et « publicité » aux évaluations17, vol.18

. Dans, elles auraient pour effet plus probablement de favoriser ou de renforcer les dysfonctionnements qu'elles sont censées réduire, c'est que j'ai des doutes sérieux, et sérieusement fondés, sur la capacité des instances administratives à produire des évaluations réellement objectives et inspirées. Et cela, fondamentalement, parce que la fin réelle de leurs opérations d'évaluation n'est pas l'évaluation ellemême, mais le pouvoir qu'elle permet d'exercer et d'accumuler en contrôlant la reproduction du corps, notamment à travers la composition des jurys. » Bourdieu, frappé de la sagesse du grand âge, aurait-il pris du recul par rapport aux propos qu'il défendait antérieurement sur l'évaluation ? Continuons : « Il est remarquable que ces responsables, qui ne parlent que critères d'évaluation, qualité scientifique, valeur du dossier scientifique, qui se précipitent avec avidité sur les méthodes scientométriques ou bibliométriques, et qui sont friands d'audits impartiaux et objectifs sur le rendement scientifique des institutions scientifiques, s'exemptent eux-mêmes de toute évaluation et se mettent soigneusement à l'abri de tout ce qui pourrait conduire à appliquer à leurs pratiques administratives les procédures dont ils préconisent si généreusement l'application »19. Ne nous y trompons pas : loin de refuser l'évaluation, de remettre en question les principes qu'il avait lui-même contribué à défendre vigoureusement depuis presque quinze ans, Bourdieu proposait au contraire de l'étendre aux évaluateurs eux-mêmes ! Encore plus d'évaluation pour résoudre les problèmes créés par l'évaluation ! Évaluons les évaluateurs et tout ira mieux dans l'évaluation ! En réduisant la problématique de l'évaluation à des pratiques de prise de pouvoir, en déplorant la difficulté de « produire des évaluations réellement objectives et inspirées, Bourdieu abordait la question de l'évaluation des chercheurs en ces termes : « Si je pense que des mesures administratives visant à améliorer l'évaluation de la recherche et à mettre en oeuvre un système de sanctions propres à favoriser les meilleures recherches et les meilleurs chercheurs, seraient au mieux inefficaces, 1997.

. Serait-ce-finalement-trop-forcer-le-trait-que-de-conclure and . Bourdieu, qu'il parle pourtant le même langage que ses supposés adversaires et qu'il leur a, pour ce qui concerne la transformation du monde universitaire, préparé le terrain ? Le point de jonction entre les deux camps porte sur la « modernisation » et la « rationalisation » de l'Etat et des institutions qui s'y rattachent, en l'occurrence, ici, l'Université. Et contrairement à ce qu'anticipaient Bourdieu et consorts, cette « modernisation » n'a pas seulement produit un peu de casse, vol.20

, ARESER, Quelques diagnostics et remèdes urgents pour une université en péril, p.96, 1997.

P. Bourdieu, Les Usages sociaux de la science -Pour une sociologie clinique du champ scientifique, INRA éditions, 1997.